Formatrice experte en NGAP, Marielle Ducastel partage les bonnes pratiques pour coter au plus juste le soin médicamenteux.
Les récentes évolutions conventionnelles ont entrainé des modifications significatives de la nomenclature des actes professionnels infirmiers (NGAP) afin de valoriser l’accompagnement par les infirmiers libéraux de la prise médicamenteuse à domicile. Comment l’optimiser, tout en étant irréprochable vis-à-vis de l’Assurance maladie ? Réponses de Marielle Ducastel, experte formatrice NGAP, dans le cadre du DPC.
Administration et surveillance d’une thérapeutique orale au domicile
Acte réservé aux patients présentant des troubles psychiatriques, il est étendu aux personnes souffrant de troubles cognitifs (maladies neurodégénératives ou apparentées) depuis le 1er décembre 2019.
Soumis à prescription médicale, le médecin devra préciser sur l’ordonnance :
• le nombre de passages journaliers à domicile,
• la nécessité d’intervention les dimanches et jours fériés,
• la durée de la prescription.
Attention : au-delà du premier mois, cet acte sera soumis à entente préalable.
Cotation : AMI 1,2 par passage
Attention : la nomenclature prévoit l’établissement d’une fiche de surveillance.
Cet acte est assorti d’une Majoration Acte Unique (MAU) pour chaque passage non associé à la dispensation d’autres actes infirmiers.
En effet, l’avenant N°6 précise bien que la MAU a été étendue aux actes uniques dont le coefficient est ≤ 1,5.
Pour l’application de cette cotation, la notion de domicile n’inclut :
• ni les établissements de santé mentionnés à l’article L 6111-1 du code de la santé publique,
• ni les établissements d’hébergement de personnes âgées, des adultes handicapés ou inadaptés mentionnés au 5° de l’article 3 de la loi n°75 – 535 du 30/06/1975 modifiée,
• à l’exception toutefois des Résidences Autonomie.
Surveillance et observation d’un patient lors de la mise en œuvre d’un traitement ou lors de la modification de celui-ci
Depuis le 1er décembre 2019, la règle préexistante d’un passage quotidien est supprimée.
La durée de prescription de cet acte ne porte donc plus sur le nombre de jours mais de passages.
Cette évolution permet au médecin de mieux adapter sa prescription en fonction de l’intensité de la surveillance requise selon les cas.
Toute modification de traitement pourra donner lieu à une nouvelle prescription si le médecin l’estime nécessaire.
La cotation de cet acte est désormais : AMI 1 par passage et non plus par jour, dans une limite de 15 passages.
Elle pourra être assortie d’une MAU pour chaque passage non associé à la dispensation d’autres actes infirmiers.
Attention : là encore la nomenclature prévoit l’établissement d’une fiche de surveillance
Séance hebdomadaire de surveillance clinique infirmière et de prévention d’une demi-heure
Depuis le 1er janvier 2022, cette séance est toujours applicable mais seulement aux patients âgés de moins de 90 ans. Selon le calendrier prévisionnel de déploiement du BSI, cette cotation sera remplacée par la nouvelle tarification au forfait pour les patients âgés de 85 à 89 ans à compter de septembre 2022 et quel que soit leur âge en avril 2023. Durant cette période transitoire, la cotation AIS4 de cette séance est désormais subordonnée à l’élaboration d’un BSI valable un an.
Elles ne peuvent être dispensées qu’une seule fois par semaine.
Cet acte comporte :
• le contrôle des principaux paramètres servant à la prévention et à la surveillance de l’état de santé du patient,
• la vérification de l’observance du traitement et de sa planification – le contrôle des conditions de confort et de sécurité du patient,
• le contrôle de l’adaptation du programme éventuel d’aide personnalisée,
• la tenue de la fiche de surveillance et la transmission des informations au médecin traitant,
• la tenue de la fiche de liaison et la transmission des informations à l’entourage ou la tierce personne qui s’y substitue.
Cet acte ne peut être coté qu’une fois par semaine : AIS 4.
Quels changements avec le BSI ? Que devient la séance hebdomadaire de surveillance clinique ? Est-elle remplacée ? Supprimée ?
Depuis le 1er janvier 2020, le BSI remplace la DSI chez tous les patients âgés de 90 ans et plus. L’avenant 8 qui adapte les conditions de déploiement du BSI ne modifie rien pour cette tranche d’âge. Par contre, depuis le 1er janvier 2022, vous devrez établir systématiquement un BSI sur les tranches d’âge inférieures pour pouvoir coter un AIS4. A compter de septembre 2022, la tarification des soins en forfaits s’imposera pour les patients dépendants âgés de 85 ans à 89 ans. Si le calendrier prévisionnel est respecté, à compter d’avril 2023, tous les patients dépendants basculeront aux forfaits BSI qui se substitueront à la séance de surveillance clinique hebdomadaire.
Dans ce contexte, vous êtes nombreux à vous poser la question suivante : « la séance de surveillance clinique hebdomadaire étant subordonnée à l’élaboration d’une DSI, ne va-t-elle pas disparaitre progressivement avec la montée en charge du BSI qui ne fait plus référence à cet acte ?»
La réponse de Marielle DUCASTEL, experte-formatrice dans le cadre du DPC :
- A ce jour, seuls les patients âgés de 90 ans et plus sont concernés par la facturation en forfaits. Pour autant, vous avez toujours la possibilité d’assurer la surveillance de ces patients dépendants à risque d’iatrogénie médicamenteuse dans le cadre d’une prise en charge de l’assurance maladie. Mais avec le BSI, vous ne serez plus rémunéré à l’acte mais au forfait en fonction de la charge en soins, par jour ou par semaine.
- Pour les tranches d’âges inférieures, à compter du 1er janvier 2022 vous devez établir systématiquement un BSI mais vous continuerez à facturer en AIS. La possibilité de réaliser et facturer « la séance de surveillance clinique hebdomadaire » demeure.
- A compter de septembre 2022 pour les 85 à 89 ans et d’avril 2023 quel que soit l’âge, les cotations AIS seront remplacées par les forfaits BSI qui se substitueront à la séance clinique hebdomadaire.
En conclusion, si dans cette période transitoire l’AIS 4 de surveillance hebdomadaire reste en vigueur selon l’âge, cette cotation est appelée à disparaitre. Cependant, en aucun cas cette évolution de nomenclature ne vous privera de la possibilité d’assurer le suivi des traitements poly médicamenteux au long cours avec risque iatrogénique des patients dépendants. Mieux encore, pour les patients pour lesquels vous assurez cette prise en charge en AIS4, votre intervention est limitée à une séance par semaine, ce qui ne sera plus le cas avec la tarification au forfait, comme nous le verrons dans l’exemple ci-après.
Exemple
Mr X fête bientôt son 90ème anniversaire, il ne pourra plus bénéficier d’une séance hebdomadaire de surveillance clinique à l’issue de la prescription en cours. Comment faire pour assurer la continuité de la surveillance de son traitement poly médicamenteux ?
Vous demandez au médecin de prescrire un Bilan de Soins Infirmiers (BSI).
Vous réalisez votre BSI en ligne.
À supposer que le cas de MR X ne vous amènerait à sélectionner dans les diagnostics infirmiers proposés du volet médical qu’un seul item dans un seul domaine de soins :
- 1/ ☐ Douleurs chroniques invalidantes avec retentissement important sur la qualité de vie
- 2/ ☐ Traitement poly médicamenteux au long cours avec risque iatrogénique
- 3/ ☐ Autre (à préciser) : ….
L’algorithme vous proposera les interventions infirmières possibles si au moins un diagnostic est posé :
Domaines de soins | Description des interventions effectuées et requises | VALEUR | GROUPE |
Traitement | Surveillance d’un patient à risque d’iatrogénie médicamenteuse en lien avec le médecin et/ou le pharmacien : repérer les patients à risque d’événements indésirables médicamenteux, sécuriser la gestion des médicaments, et gérer les situations à risque et les alertes | 6 | T2 |
Si Mr X est polymédiqué, vous pouvez aussi proposer des soins éducatifs :
Domaines de soins | Description des interventions effectuées et requises | VALEUR | GROUPE |
Soins éducatifs | Prise en charge relationnelle infirmière de patients dépendants demandant une :-aide éducative d’un patient atteint de pathologie(s) chronique(s) pour acquérir ou maintenir des compétences dont il a besoin dans la vie courante et dans le suivi de son traitement | 6 | SE2 |
L’algorithme déterminera dans ce cas un classement en classe légère (BSA) et vous aurez la possibilité de sélectionner pour ces soins une fréquence hebdomadaire.
Conclusion pour Mr X, en passant d’une DSI au BSI, la cotation passe :
- d’un AIS 4 d’une durée d’une demi-heure, soit 10,60€ (plus déplacement : IFD 2,50€) -Elaboration de la DSI initiale 15€, valable trois mois, 10€ pour les suivantes
- à un BSA sans durée de soins opposable, soit 13€ (plus déplacement : IFI 2,50€) -Elaboration du BSI initial 25€, valable un an, un seul renouvellement par an 12€
Bon à savoir :
DSI : séance de surveillance clinique hebdomadaire.
BSI : vous pouvez programmer plusieurs forfaits par semaine.
Dans l’exemple de Mr X, s’il nécessite, en plus du forfait hebdomadaire BSA, la pose de dispositif transcutané type Durogesic avec évaluation et suivi de la douleur par test nécessitant plusieurs passages par semaine : vous pouvez proposer plusieurs forfaits BSA hebdomadaires.
Vous sélectionnerez également comme diagnostic infirmier ;
« Douleurs chroniques invalidantes avec retentissement important sur la qualité de vie ».
L’algorithme vous proposera une intervention possible dans le domaine de soins douleur.
Autre avantage du forfait BSA vis-à-vis de l’AIS 4 : il est cumulable avec certains actes techniques (cotés AMX dans le cadre du BSI) :
• à taux plein en dérogation de l’art. 11B de la NGAP avec une perfusion, un pansement lourd et complexe, un prélèvement sanguin et la séance à domicile de surveillance clinique et de prévention pour un patient à la suite d’une hospitalisation pour épisode de décompensation d’une insuffisance cardiaque ou d’exacerbation d’une BPCO,
• à demi-tarif pour les autres actes prescrits.
Exemples
• Cumul BSA avec pansement complexe : BSA + AMX 4 + MCI
• Cumul BSA et prélèvement sanguin : BSA + AMX 1,5
• Cumul BSA et injection IM : BSA + AMX1/2